Bien immobilier et divorce : qui garde la maison ?

Vous êtes ici : Accueil > Actualités > Bien immobilier et divorce : qui garde la maison ?
Le 03 décembre 2025
Bien immobilier et divorce : qui garde la maison ?
Découvrez vos droits sur le logement familial lors d'un divorce. Attribution préférentielle, rachat de soulte, protection des enfants

Lors d'un divorce, le sort du logement familial représente souvent l'enjeu patrimonial le plus important et le plus émotionnel pour les époux. Au-delà de sa valeur financière, cette résidence incarne des années de vie commune et reste parfois le foyer des enfants. La question de l'attribution du bien immobilier soulève des interrogations juridiques complexes qui nécessitent une analyse approfondie de votre situation. Maître Florence ESTIENNY, avocat à Paris 16e, vous accompagne dans cette étape délicate pour protéger vos intérêts patrimoniaux et trouver les solutions adaptées à votre situation familiale.

  • L'attribution préférentielle du logement dépend de trois critères principaux : la garde des enfants (critère prioritaire), la situation économique de chaque époux et l'occupation effective du bien au moment de la procédure
  • Le rachat de soulte se calcule selon une formule précise : (valeur du bien - capital restant dû) / 2, avec des frais de notaire représentant 7 à 8% du montant de la soulte
  • Le droit de partage s'élève à 1,10% de la valeur nette des biens partagés depuis le 1er janvier 2022 (forfait de 125 euros pour les patrimoines inférieurs ou égaux à 5 000 euros)
  • La désolidarisation du prêt immobilier nécessite un délai d'instruction de 1 à 6 mois par la banque après réception de la demande par lettre recommandée

Les enjeux du logement familial lors du divorce

Durant toute la durée du mariage, l'article 215 alinéa 3 du Code civil protège le logement familial en imposant le consentement des deux époux pour tout acte de disposition. Cette protection légale signifie qu'aucun époux ne peut vendre, louer ou hypothéquer seul la résidence principale, même s'il en est l'unique propriétaire. Cette règle s'applique jusqu'à la dissolution définitive du mariage par le jugement de divorce.

Imaginons le cas de Marie et Pierre, mariés depuis quinze ans. Bien que leur maison soit au nom de Pierre qui l'avait achetée avant le mariage, il ne peut pas la vendre sans l'accord de Marie tant que leur divorce n'est pas prononcé. Cette protection vise à préserver le toit familial et éviter qu'un époux ne se retrouve brutalement sans logement.

Les questions cruciales qui se posent concernent d'abord la propriété du bien : qui figure sur l'acte notarié ? Le bien a-t-il été acquis avant ou pendant le mariage ? Avec quels fonds ? Le financement constitue également un enjeu majeur : qui rembourse le crédit immobilier ? Existe-t-il des apports personnels ? Enfin, la présence d'enfants et l'attribution de leur garde influencent considérablement les décisions du juge concernant le logement.

Votre régime matrimonial détermine largement vos droits sur le bien immobilier. Sans contrat de mariage, vous relevez du régime légal de communauté réduite aux acquêts. Les époux ayant opté pour un contrat de mariage peuvent être soumis à des règles différentes (séparation de biens, participation aux acquêts, communauté universelle). Il est donc essentiel de vérifier votre situation matrimoniale avant d'engager toute démarche.

Les délais pour organiser le partage varient selon le type de divorce. En cas de divorce par consentement mutuel, la liquidation du régime matrimonial doit être effectuée avant l'enregistrement de la convention. Pour un divorce contentieux, vous disposez de neuf mois à compter de la première audience pour faire appel à un notaire.

À noter : L'ordonnance de non-conciliation fixe l'attribution provisoire du logement pendant toute la procédure de divorce (30 mois maximum) et constitue un justificatif valable pour une demande de logement social. Cette mesure provisoire d'urgence permet de sécuriser votre situation résidentielle pendant la procédure.

Les règles de répartition selon votre régime matrimonial

Régime de communauté réduite aux acquêts (régime légal)

Dans ce régime, qui s'applique automatiquement sans contrat de mariage, il convient de distinguer les biens propres de chaque époux et les biens communs. Les biens propres comprennent ceux possédés avant le mariage et ceux reçus par donation ou succession pendant l'union. Les biens communs englobent tous les acquêts réalisés pendant le mariage, peu importe lequel des époux les a financés.

Prenons l'exemple de Sophie et Marc. Sophie avait hérité d'un appartement avant son mariage : ce bien reste sa propriété exclusive. En revanche, la maison qu'ils ont achetée ensemble après leur union appartient à la communauté et sera partagée par moitié, même si Marc a payé davantage de mensualités.

Le système des récompenses permet de rééquilibrer les comptes entre époux lorsque des fonds propres ont enrichi la communauté ou inversement. Si un époux a utilisé une donation personnelle pour payer une partie du prix d'achat d'un bien commun, il pourra récupérer cette somme actualisée lors du partage. Le calcul prend en compte la plus-value réalisée selon la formule : (apport personnel / prix d'acquisition) × valeur actuelle du bien.

Régime de séparation de biens

Sous ce régime, chaque époux conserve la propriété exclusive de ses biens personnels. Seuls les biens acquis en indivision nécessitent un partage. L'acte d'achat précise généralement les quotes-parts de chaque époux. À défaut d'indication, la propriété est présumée égalitaire.

Considérons le cas d'Émilie et Thomas, mariés sous le régime de séparation de biens. Ils ont acheté leur résidence principale en indivision à 70/30 selon leurs apports respectifs. Lors du divorce, Thomas conservera 70% de la valeur du bien et Émilie 30%, sauf accord contraire.

Ce régime simplifie le partage mais peut créer des déséquilibres si un époux s'est davantage investi dans le foyer familial au détriment de sa carrière professionnelle. La prestation compensatoire peut alors corriger ces disparités (le juge peut même attribuer un droit d'usage et d'habitation sur le logement familial comme modalité de prestation compensatoire, avec le consentement du débiteur).

Régime de participation aux acquêts

Ce régime hybride, moins courant mais parfois choisi par contrat de mariage, fonctionne comme une séparation de biens pendant le mariage mais comme une communauté au moment du divorce. Chaque époux gère librement ses biens pendant l'union, mais lors de la dissolution, le conjoint le moins enrichi bénéficie d'une partie de l'enrichissement de l'autre. Le calcul s'effectue en comparant le patrimoine initial et final de chaque époux, puis en partageant la différence d'enrichissement par moitié.

Conseil : Si vous avez opté pour ce régime, conservez précieusement tous les justificatifs de votre patrimoine initial (relevés bancaires, actes de propriété, inventaires notariés). Ces documents seront indispensables pour établir la comparaison des patrimoines et calculer la créance de participation.

Comment garder ou récupérer le logement familial

L'attribution préférentielle du logement

L'article 831-2 du Code civil permet de demander l'attribution préférentielle d'un bien indivis moyennant le versement d'une soulte. Cependant, cette attribution n'est jamais automatique selon l'article 1476 du Code civil. Le juge apprécie souverainement chaque demande en fonction de trois critères principaux.

D'abord, la garde des enfants constitue un élément déterminant. Le parent qui obtient la résidence habituelle des enfants a de meilleures chances de se voir attribuer le logement familial pour préserver leur stabilité. Ensuite, la situation économique de chaque époux est analysée : capacité financière à assumer les charges du logement, possibilités de relogement, revenus respectifs. Enfin, l'occupation effective du bien au moment de la procédure influence la décision.

Pour les familles avec enfants, l'article 285-1 du Code civil prévoit une protection supplémentaire. L'époux ayant la garde peut bénéficier d'un bail forcé sur le logement appartenant à l'autre conjoint. Ce bail peut être renouvelé jusqu'à la majorité du plus jeune enfant, garantissant ainsi la stabilité du foyer familial.

À noter en cas de violences conjugales : L'ordonnance de protection permet l'attribution prioritaire du logement à la victime dans un délai maximal de six jours, même si elle a quitté le domicile pour échapper aux violences. Cette mesure d'urgence garantit la sécurité de la victime tout en préservant ses droits sur le logement familial.

Le rachat de soulte du conjoint

Le rachat de soulte permet à un époux de devenir seul propriétaire en racheter la part de l'autre. Le calcul s'effectue selon la formule : (valeur du bien - capital restant dû) / 2 pour un partage égalitaire. Par exemple, pour une maison estimée à 400 000 euros avec 100 000 euros de crédit restant, la soulte s'élève à 150 000 euros.

L'estimation du bien immobilier peut s'effectuer selon trois méthodes : faire appel à un expert agréé par les tribunaux (solution la plus objective mais coûteuse), comparer avec les ventes récentes de biens similaires dans le secteur, ou consulter plusieurs agences immobilières pour obtenir une moyenne. La valeur vénale retenue tient compte de la demande du marché et des données comparables du secteur.

Le financement de cette soulte nécessite souvent un nouveau crédit immobilier. Les banques examinent votre capacité d'emprunt en tant qu'emprunteur unique. Les frais de notaire représentent 7 à 8% du montant de la soulte et s'ajoutent au coût total de l'opération. Une solution de financement alternative consiste à recourir au crédit hypothécaire, qui permet d'emprunter jusqu'à 50% de la valeur du bien existant sans questionnaire de santé ni limite d'âge, avec des frais de 8,5% du montant emprunté.

La désolidarisation du prêt initial constitue une étape cruciale. Sans cette démarche, l'ex-conjoint reste solidairement responsable du remboursement malgré la cession de sa part. La banque peut exiger de nouvelles garanties comme une caution ou une hypothèque avant d'accepter cette désolidarisation (délai d'instruction de 1 à 6 mois après réception de la demande par lettre recommandée).

Les alternatives en cas de désaccord ou d'impossibilité

Lorsque l'attribution à l'un des époux s'avère impossible ou source de conflit, plusieurs solutions alternatives existent. La vente amiable du bien reste la solution la plus simple et économique. Les époux s'accordent sur le prix de vente et se partagent le produit selon leurs droits respectifs. Cette option évite les frais de procédure et permet une liquidation rapide. Attention toutefois à la fiscalité : l'ex-conjoint ayant quitté le logement bénéficie de l'exonération de plus-value si la vente intervient dans un délai maximal d'une année et que le bien n'a pas été loué entre-temps.

L'indivision temporaire peut constituer une solution transitoire. Les ex-époux restent copropriétaires le temps de trouver un accord ou d'améliorer leur situation financière. Une convention d'indivision notariée fixe les règles d'occupation, la répartition des charges et l'éventuelle indemnité d'occupation. Cette indemnité se calcule sur la base de la valeur locative avec des abattements possibles selon la situation : 10 à 30% pour la précarité de l'occupation, 25% pour l'état du bien si des travaux sont nécessaires, et 10 à 20% pour l'hébergement des enfants selon leur nombre et le mode de garde.

En dernier recours, la vente par licitation peut être ordonnée par le tribunal. Cette procédure judiciaire intervient lorsque les époux ne parviennent à aucun accord. Depuis 2009, les indivisaires détenant au moins deux tiers des droits peuvent demander la vente même contre l'avis du minoritaire. Cette solution reste coûteuse et génère souvent des tensions supplémentaires. Le droit de partage s'élève à 1,10% de la valeur nette des biens partagés depuis le 1er janvier 2022, avec un tarif forfaitaire de 125 euros pour les patrimoines inférieurs ou égaux à 5 000 euros.

Prenons l'exemple concret de Caroline et David, divorcés après 12 ans de mariage. Leur maison commune est estimée à 350 000 euros avec un crédit restant de 80 000 euros. Caroline souhaite garder la maison pour leurs deux enfants dont elle a la garde principale. Elle doit racheter la part de David : (350 000 - 80 000) / 2 = 135 000 euros de soulte, plus environ 10 000 euros de frais de notaire. Ne pouvant obtenir ce financement, ils optent pour une indivision temporaire de deux ans avec une indemnité d'occupation mensuelle de 600 euros versée à David (valeur locative de 1 000 euros avec abattement de 20% pour l'hébergement des enfants et 20% pour la précarité).

L'accompagnement par des professionnels s'avère indispensable pour naviguer dans ces procédures complexes :

  • Le notaire établit l'acte de partage et calcule les récompenses éventuelles
  • L'expert immobilier réalise une estimation objective du bien
  • Le juge aux affaires familiales tranche les litiges et ordonne les mesures nécessaires
  • L'avocat défend vos intérêts et négocie les meilleures solutions

 

Face à la complexité des enjeux patrimoniaux lors d'un divorce, l'expertise juridique devient indispensable pour protéger vos droits et trouver des solutions équilibrées. Maître Florence ESTIENNY, avocat à Paris 16e, vous accompagne dans toutes les étapes du partage de votre bien immobilier. Fort d'une solide expérience en droit de la famille et en droit patrimonial, le cabinet analyse votre situation matrimoniale, évalue vos options et défend vos intérêts devant les tribunaux si nécessaire. Que vous souhaitiez conserver le logement familial ou organiser sa vente dans les meilleures conditions, Maître ESTIENNY vous guide vers la solution la plus adaptée à votre situation personnelle et financière.